Corps réels, imaginaires, mortels. Femmes en création

Le confinement a mis nos corps à l’arrêt, nous a bousculées dans notre quotidien. Il a ensablé nos outils d’analyse scientifique. Avec des artistes qui, par leurs pratiques de l’écart, du pas de côté, nous ont offert d’autres façons de voir, d’entendre et de penser, nous avons pu réaliser un entrelacs original et éclairant d’œuvres créatrices.

Comment vivre dans un monde à l’arrêt ? Qu’est-ce qu’une vie quand on ne peut plus toucher, embrasser, voir cet autre si nécessaire et parfois si pesant ? Comment travailler quand toutes les perspectives sont aspirées dans le néant de l’incertitude ?

Huit femmes d’horizons différents (poète, plasticiennes, photographe, sociologue, historienne, consultante en interculturalité) rompent l’isolement intellectuel pour ouvrir un dialogue. Leur rapprochement génère une recherche en acte, vivante, rapportée dans un dialogue arts/sciences sociales original et fécond.

Arts et sciences humaines partagent un même objectif de représentation du monde, mais par des modes très différents qui s’ignorent souvent. Les artistes peuvent s’emparer de l’espace de la fiction, de l’imaginaire et exposer, dans une galerie virtuelle, la réalité des corps : des corps de femmes qui interrogent, notamment, l’absence, le silence à partir de photos (A. Arth), les résistances aux contraintes par la performance (I. Pittatore) et les arts plastiques (Aartemis), la colère par la poésie (C. Ber) ou toute la complexité de ces notions. Les scientifiques ( S. Denèfle, K. Lambert, I. Demangeat) analysent les données du passé et du présent pour amener la pensée rationnelle jusqu’à des lectures explicatives de la réalité. Toutes, ici, travaillent sur des corps mouvants qui déplacent les frontières et réinterrogent les possibles. Il s’agit de résister à ce rétrécissement du monde imposé au nom de la survie, de la solidarité, de la nécessité de prendre soin des autres. Il est question de (ré)agir face à ce creusement des inégalités, cette explosion des violences domestiques qui placent une fois encore les femmes en première ligne. Il convient, enfin, de vivre dans une société qui place la culture du côté du non-essentiel !

Le confinement a bousculé les façons de vivre, toutes ont eu besoin de bousculer leurs façons de penser. Il les avait isolées. Elles ont voulu, par les techniques à leur disposition, se réunir pour analyser ensemble, avec toutes leurs spécificités, cette violence qui a pesé lourdement sur les femmes.

Des œuvres d’art originales, des données sociales, des échanges croisés de perspectives singulières sont réunis dans une présentation qui constitue un matériau premier dans lequel s’ancrent des dialogues et des analyses issus de l’ouverture d’un espace commun aux arts et aux sciences humaines.

Ces réalisations viendront également enrichir les analyses des jeunes chercheur.es mobilisé.es lors de l’école de recherche sur le genre Cormed (16-18 décembre 2020), qui interrogera la place prise par les corps minorisés dans les temps de crises, du passé ou d’aujourd’hui.

Pour aller plus loin

  • Aartemis (plasticiennes)

  • Adrienne Arth (photographe)

  • Claude Ber (écrivaine)

  • Isabelle Demangeat (consultante senior)

  • Sylvette Denèfle (sociologue)

  • Karine Lambert (historienne)

  • Irene Pittatore (performeuse-plasticienne)

  • Corps surveillés / corps mobilisés / corps exposés en Méditerranée. Les outils d’une résistance

    CORMED : Ecole de recherche sur le genre (France - Turquie - Tunisie), 16-18 décembre 2020